« La mixité doit être au cœur des responsabilités des entreprises »
Les entreprises doivent pouvoir compter sur une mixité de profils pour être performantes et efficaces. Cette mixité passe par une répartition entre femmes et hommes, y compris dans les organes dirigeants, mais également et surtout par une diversité des profils, des expériences et des compétences. C’est l’avis de Dorothée Sineux, co-fondatrice de l’entreprise Pharmalp, basée au PhytoArk de Conthey. Elle nous a accordé une interview à l’occasion de la journée internationale des droits de la femme, célébrée en ce 8 mars.
Dorothée, quel est, en quelques mots, votre parcours professionnel ?
Je suis originaire de Chamonix, avec une formation en école de commerce. Je travaille depuis une vingtaine d’années dans le développement commercial de compléments alimentaires et produits de santé. Pendant dix ans, j’ai œuvré en tant que responsable export d’un laboratoire français. C’est là que j’ai fait la connaissance de Philippe Meuwly, avec lequel j’ai co-fondé Pharmalp en 2012.
Quelles sont vos activités principales au sein de Pharmalp ?
Aux débuts de Pharmalp, j’ai pris la responsabilité des ventes et marketing. Je suis maintenant directrice opérationnelle et j’assure le bon déroulement des opérations. Ma mission actuelle, c’est le développement international avec l’ouverture de partenariats, par exemple en Chine en Jordanie, à Hong-kong et d’autres marchés en discussion. Pharmalp compte aujourd’hui 12 employés, dont un chef des ventes pour la Suisse. Il fallait que l’entreprise ait une certaine taille et une certaine caution avant d’aller à l’international. C’est maintenant en cours et cela me réjouit.
Qu'est-ce qui vous motive dans votre travail quotidien ?
Deux choses m’importent au quotidien : le fait de trouver un sens à mon travail et de pouvoir travailler de manière agile. Grâce à Pharmalp, je peux m’épanouir sur les deux plans. Nous développons des produits qui ont de vrais bénéfices pour la santé, notamment pour celle des femmes. On apporte des solutions efficaces et innovantes à des troubles uro-génitaux récurrents, tout en limitant l’utilisation d’antibiotiques. Pharmalp répond donc à de vrais problèmes, tout en résolvant un enjeu de société. J’aime également ne pas travailler dans un environnement trop figé. Là aussi, avec Pharmalp, on est capables de changer rapidement nos projets et notre façon de travailler. Cette agilité est très motivante pour moi.
Est-ce que cela a été difficile de vous faire une place un poste de direction en tant que femme ?
En fait, je ne me suis jamais posé la question. Je pense que cela dépend du type de structure. Mais dans mes précédents emplois comme chez Pharmalp, il y a toujours eu la possibilité, pour celles et ceux qui le voulaient, de prendre les rôles souhaités et de pouvoir évoluer dans la structure. Reste que tous mes choix professionnels ont été guidés par un épanouissement personnel et des projets qui me motivaient. Ce n’était jamais l’objectif de faire carrière.
Etre une femme membre d'une direction d'entreprise en 2023, qu'est-ce que cela implique pour vous ?
C’est normal et cela n’implique rien de particulier, du moins rien de plus que si j’étais un homme. Je suis fière de mon parcours, et je ne me suis jamais mis de barrière en lien avec mon sexe. J’aimerais en revanche qu’une femme à un poste de dirigeante implique moins de surprise et moins de questionnements.
Dans le fonctionnement des équipes, quel est selon vous l’apport de la mixité ?
Chez Pharmalp, nous ne nous sommes jamais posé la question du genre. Ce n’est pas un critère, surtout que nous comptons actuellement environ 75% de femmes. Je préfère en revanche parler de diversité plutôt que de mixité des genres. Il est important d’avoir des expériences, des âges ou des parcours différents au sein d’une entreprise. Maintenant, notamment dans le domaine de la vente, je trouve que les femmes sont davantage orientées solutions et sont plus pragmatiques.
Pour vous, que célèbre-t-on le 8 mars ?
Pour moi, c’est avant tout la nécessité de rappeler ce qui a été acquis au fil des années pour les droits des femmes. Il est notamment important d’expliquer aux nouvelles générations - pour qui tout est assez normal aujourd’hui - que nous avons dû nous battre pour avoir les droits qui sont les nôtres actuellement. Et aussi ne pas oublier qu’il y a encore beaucoup de choses à faire en termes d’égalité, mais également de reconnaissance.
Dans les changements au sein des entreprises, en lien avec la responsabilité sociétale et les nouveaux modèles de gouvernance, comment voyez-vous la plus-value féminine ?
Plusieurs récentes études menées aux Etats-Unis font un lien direct entre gouvernance féminine et performance financière. Les entreprises dirigées par des femmes ont souvent une meilleure performance. Dans les équipes, il me semble que les femmes prennent des risques plus réfléchis. Elles sont en général plus factuelles qu’intuitives.
Quoi qu’il en soit, dans la direction d’une entreprise, il est toujours important de confronter les avis et les façons de faire, et on en revient à la mixité et à la diversité, très utile dans les PME. La mixité, au sens large, doit vraiment être au cœur des responsabilités sociales et sociétales des entreprises.
Reste que les femmes savent moins bien se vendre que hommes, et cela nous dessert. Cela vient certainement du fait que nous courrons moins après la reconnaissance. J’espère que cela va changer pour que l’on revienne davantage à des notions de compétence et de modes de fonctionnement plutôt que de mise en avant de l’individu.